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  • Posté le 20 juillet 2023.

Douane suisse : réforme sur le port de l’arme… au bureau

L’administration Suisse vient de mettre en place une réforme structurelle de ses services douaniers. Elle impose notamment le port de l’arme à feu pour tous les douaniers, y compris dans les bureaux. Imposée de manière unilatérale par la direction. A l’occasion de son assemblée générale annuelle des délégués, le syndicat Garanto a souhaité débattre de cette réforme, entre autres, avec les syndicats des pays limitrophes (France, Allemagne, Autriche et Italie). Le secteur Europe et international de la CGT a ainsi sollicité le syndicat CGT des douanes pour y participer.

Armement, y compris pour les personnels administratifs

L’assemblée générale du syndicat des Douanes, Garanto, s’est déroulée le 5 mai 2023 à Genève. Garanto est largement majoritaire au sein de la profession en Suisse. Le matin, le débat a porté sur une réforme imposant le port de l’arme au travail pour les personnels administratifs de la douane Suisse, comme leurs homologues gardes-frontière.

Il est important de signaler que l’administration Suisse ne dispose pas d’instances de dialogue social. La réforme est donc appliquée sans concertation ni discussion avec les personnels et leurs représentants. Au sein du syndicat s’est donc ouvert un débat quant à savoir s’il est possible ou non de s’opposer à une réforme promulguée et si une telle réforme ne mérite pas un encadrement plus strict.

Au-delà du fait qu’il est incompréhensible pour eux de devoir porter une arme dans un bureau, ils ne mesurent pas non plus toutes les conséquences induites. C’est dans cet esprit qu’ils ont invité les syndicats des pays voisins.

Ce fut l’occasion pour le syndicat CGT des Douanes de rappeler la vigilance nécessaire à apporter au port de l’arme. Avant tout, il ne faut pas oublier qu’une arme expose son porteur et surtout… tue ! Il n’est donc pas possible de traiter la question avec légèreté. La CGT Douanes a particulièrement pointé la nécessité :

  • d’évaluer régulièrement l’aptitude physique et psychologique du porteur de l’arme ;
  • de mettre en place d’un système d’habilitation par le biais d’un moniteur de tir qui juge de la compétence au tir, au chargement, au déchargement, etc. ;
  • de former tout au long de la carrière (savoir porter une arme un jour n’est pas savoir porter une arme toujours) ;
  • d’assurer un suivi médical avec une visite médicale annuelle pour déterminer une éventuelle incapacité physique ou psychologique qu’elle soit temporaire ou définitive.

Ce sont aussi ces caractéristiques qui entrainent la reconnaissance du risque et de la pénibilité qui fondent la catégorie active et le départ en retraite anticipé.

Chaque douane européenne est spécifique

Il est utile de rappeler que les douanes ont pour responsabilité première de contrôler les marchandises qui rentrent, sortent ou traversent un territoire. Elles ont également pour fonction de lutter contre toutes les fraudes, trafics, réseaux criminels toujours au regard des marchandises (stupéfiants, armes, contrefaçons, etc.).

Les différentes réformes européennes telles que l’ouverture des frontières en 1993 ou l’élargissement des frontières aux pays de l’Est ont entrainé des bouleversements importants des services douaniers européens. Dans ce cadre, chaque pays a été amené à faire ses propres choix politiques, parfois inverses d’un pays à l’autre, au point d’avoir aujourd’hui des douanes très différentes.

Autriche

Le pays a perdu environ un tiers de ses emplois par rapport à 2004. Une partie de ses missions ont été transférées au ministère de l’Intérieur. Cela pourrait paraître logique compte-tenu du port de l’uniforme. Pourtant, les fonctions économiques de la douane ne sont pas celles de l’Intérieur.

Aujourd’hui, la Douane autrichienne s’est recentrée sur la police des personnes. Ils ne contrôlent plus ou presque les marchandises. Pour autant, les trafics en tous genre ne cessent de se développer. Avec une Europe ouverte, un pays sans Douane c’est un pays qui facilite le passage des trafics vers les pays frontaliers. Par ailleurs, les entreprises continuent de subir les affres des concurrences déloyales du fait du manque de contrôle des marchandises.

Allemagne

En Allemagne, au contraire, les effectifs ont plus que doublé depuis 1993. Ils sont 49 000. Le pays est parti du principe que la Douane est la police de la marchandise ce qui impose plus de contrôle.

Ils ont aussi fait le choix de protéger leur économie et leurs entreprises. Ainsi, grâce à cette protection, les entreprises allemandes souffrent moins de concurrence déloyale et donc délocalisent moins. Ils vont même plus loin en accompagnant les entreprises à l’international pour un soutien de leur commerce extérieur. Ils sont pourtant les seuls à l’avoir fait au niveau européen.

L’Allemagne a aussi rendu son pays attractif en aspirant le trafic maritime du fait d’un service public douanier efficace qui facilite l’importation dans sa fluidité. Par ailleurs, le pays a maintenu un réseau de proximité avec plus de 900 bureaux contre 230 environ en France pour une population de seulement 18% inférieure.

France

La douane française devrait aussi être renforcée dans l’intérêt de la protection de la population et des entreprises. Pourtant les effectifs sont passés de 23 000 en 1989 à 17 000 aujourd’hui. Alors que la France dispose de beaucoup plus de frontières sur quasiment tous les continents, les choix politiques restent opposés. Si nous devions appliquer le même ratio de douanier par habitant, il en faudrait 40 000 ! La France est donc un pays qui ne souhaite clairement pas autant protéger ses citoyens et ses entreprises.

A cela se rajoute de nouvelles missions comme la lutte anti-terroriste, la mise en œuvre du Brexit, la gestion des nouvelles règlementations, etc.

Le syndicat CGT des douanes est ravi de ce partage d’expérience très enrichissant pour tous. Nos administrations ne se cachent pas qu’elles échangent, il n’y a donc aucune raison de ne pas le faire de notre côté. A l’instar de l’initiative des États généraux de la Douane que nous avions menée en France en 2013, il nous faudrait construire une rencontre de toutes les organisations qui défendent le service public douanier au niveau du territoire européen.

Cette proposition, nous l’avons faite lors de l’Assemblée générale de Garanto à tous nos homologues présent en ne manquant pas de saluer et remercier chaleureusement nos camarades suisses pour cette initiative et leur invitation.


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